Page:Sand - Cadio.djvu/26

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RABOISSON. Je l’ai connu beaucoup dans sa jeunesse.

ROXANE. Il n’est donc plus jeune ?

RABOISSON, souriant. Si fait ! une quarantaine d’années, comme nous !

ROXANE. On le dit charmant !

RABOISSON. Au contraire, il est laid, mais il plaît aux femmes.

LOUISE, ingénument. Pourquoi ?

RABOISSON, embarrassé. Parce que… parce qu’il est laid, je ne vois pas d’autre raison.

ROXANE, bas, à Raboisson. Et parce qu’il les aime, n’est-ce pas ?

RABOISSON, de même. Chut ! il les adore !

ROXANE. Alors, c’est un héros ! comme César, comme le maréchal de Saxe !

LE COMTE, qui a parlé avec le chevalier. Je ne vous demande qu’une chose, c’est de ne pas courir au-devant de l’insurrection. Ce serait m’exposer à des soupçons… Si elle vous entraîne et vous emporte en passant, je n’aurai de comptes à rendre à personne ; mais n’oubliez pas qu’en vous donnant asile chez moi dans ces jours de persécution, j’ai répondu de vous sur mon propre honneur.

LE CHEVALIER. Je ne l’oublierai pas, monsieur.

RABOISSON. Quant à moi, mon cher comte, il y a une circonstance qui me rendra aussi sage que vous pouvez le désirer : c’est que l’insurrection est fomentée par les prêtres ; or, je ne suis pas de ce côté-là : voltairien j’ai vécu, voltairien je mourrai.

LE CHEVALIER. Il n’y a pas de quoi se vanter, monsieur !

RABOISSON. Pardonnez-moi, jeune homme ! Libre à vous