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Scène V. — Les Mêmes, LE CAPITAINE.


LE CAPITAINE, parlant sur le seuil à un lieutenant accompagné de quatre hommes, à voix basse. Posez les sentinelles et faites faire bonne garde. Ne souffrez pas de rixe avec les habitants, pas de provocation inutile. Vous rencontrerez des figures suspectes, n’arrêtez personne sans une absolue nécessité, tels sont les ordres supérieurs. N’engageons pas d’affaire avant l’arrivée des grenadiers. Dans deux heures, j’irai faire avec vous une reconnaissance. (Il entre seul dans l’auberge.)

JAVOTTE, bas, à Rebec. Un joli garçon, tout blond, tout jeune ; il ne doit pas être bien méchant, celui-là ?

REBEC, observant le capitaine qui s’approche de la cheminée machinalement, en réfléchissant. Pas méchant ? Il a des yeux qui brillent comme des étoiles. — Allume donc une autre chandelle, on ne se voit pas ici ! (Au capitaine, pendant que Javotte allume.) Tu dois être fatigué, citoyen officier, après cette étape de nuit ? (Le capitaine, absorbé, ne fait pas attention à lui.) Au reste, dans le fort de l’été, comme ça, il vaut mieux marcher à la fraîcheur ! (Silence du capitaine.) Et puis, pour dérouter l’ennemi, n’est-ce pas ? (À Javotte.) Je vois ce que c’est ! Il est sourd comme un pot ! (Au capitaine ; d’une voix élevée et lui montrant la table servie.) Ce déjeuner t’attendait, capitaine ! Si tu veux t’asseoir…

LE CAPITAINE. Merci, je n’ai pas faim.

REBEC. Ni soif ? (Le capitaine dit non avec la tête. À Javotte.) Alors, nous mangerons le déjeuner. C’est ne pas avoir de chance : les blancs n’ont pas le temps, les bleus n’ont pas d’appétit… (Haut.) Capitaine… (Le capitaine a un léger mouvement d’impatience et porte les mains à ses oreilles.) C’est ça, il est sourd ! J’ai beau crier !