Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/220

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que le ciel nous réconcilie. Quant à moi, je ne me défendrai en aucune façon d’avoir été fort irrité contre vous, et il n’est pas nécessaire de me supposer une fatuité stupide pour découvrir la cause de mon mécontentent. Je crois, d’après ma tante, que vous êtes serviable et libérale pour le plaisir de l’être ; mais ceci ne vous justifie pas à mes yeux d’un défaut que, pour ma part, je trouve insupportable : le besoin de servir les gens malgré eux et de leur imposer des obligations envers vous. Vous avez été élevée dans une atmosphère de bienfaisance facile et de bénédictions intéressées qui vous a enivrée. C’est peut-être l’erreur d’une âme portée au dévouement ; mais quand ce dévouement veut s’imposer, la bonté devient une offense. Depuis que ma tante vit près de vous, vous avez sans cesse tenté de m’amener à vous devoir de la reconnaissance, et mon refus vous a surprise comme un acte de révolte. Vous me l’avez fait sentir en me raillant très-amèrement la seule fois que je me suis présenté chez vous, et c’est dans cette entrevue que je vous ai connue et jugée beaucoup plus et beaucoup mieux que ma tante ne vous juge et ne vous connaît. Vous avez tenté de me persuader que ma fierté vous causait un grand chagrin, vous avez joué une petite comédie d’un goût douteux, et vous avez même un peu souffert dans votre orgueil en voyant que je ne la prenais pas au sérieux. Vous avez oublié cette légère contrariété à la première contredanse, j’en suis, bien certain ; mais vos caprices de reine ne vous quittent jamais tout à fait.