Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/303

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marquise. Bertrand avait cherché madame chez elle, et, ne l’y trouvant pas, il était retourné au salon d’honneur pour dire à M. de Rivonnière qu’il allait la chercher dans le corps de logis habité par M. Dietrich ; mais le marquis n’était plus là, et les autres domestiques assuraient l’avoir vu aller au jardin. Dans le jardin, Bertrand ne l’avait pas trouvé davantage, non plus que dans les appartements de la marquise. Il était pourtant certain que M. de Rivonnière n’avait pas quitté l’hôtel.

M. Dietrich et M. de Valbonne se mirent à sa recherche ; Césarine rentra dans son appartement, où le marquis s’était glissé inaperçu et l’attendait ; elle eut un mouvement d’effroi et voulut sonner. Il l’en empêcha en se plaçant entre elle et la sonnette.

— Écoutez-moi, lui dit-il, c’est pour la dernière fois ! Je connais trop votre maison pour y errer à l’aventure. Je voulais parler à votre père, j’ai pénétré tout à l’heure dans son cabinet, j’ai entendu votre voix et celle de Valbonne. J’ai écouté. Un homme condamné a le droit de connaître les motifs de sa sentence. J’ai appris une chose que j’ignorais, c’est que je suis fou, et une chose dont je voulais encore douter, c’est que votre indifférence pour moi s’était changée en terreur et en aversion. Je suis bien malheureux, Césarine ; mais je vous absous, moi, d’avoir fait sciemment mon malheur. Vous n’avez jamais connu l’amour et ne le connaîtrez jamais, c’est pourquoi vous ne vous êtes pas doutée de la violence du mien. Vous n’avez jamais cru qu’on en pût devenir fou ; vous avez toujours raillé mes plaintes et mes