Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/280

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Et, s’adressant à M. Barthez :

— Elle n’a pas beaucoup connu son père, cette chère Lucienne ?

— Elle ne le connaît pas du tout, répondit M. Barthez.

— Ah ! pardon ! reprit M. de Malaval, qui, on se le rappelle, n’avait jamais de souvenirs conformes à la vérité ; lorsqu’il est revenu en France à l’époque… Attendez… C’était en 1807. J’en suis sûr, je l’ai vu ; il m’a dit…

— Ce n’est pas le moment de rêver des choses qui ne sont jamais arrivées, reprit M. Barthez avec impatience. Le marquis n’est jamais revenu de l’émigration, et Lucienne ne l’a jamais vu.

— Si vous vous figurez cela, dit M. de Malaval, raison de plus pour…

— Vous avez un malheur de famille à nous apprendre ? m’écriai-je en m’adressant à M. Barthez. Mon père ?…

— Vous ne l’avez jamais vu, mon enfant ? répondit-il. Eh bien, vous ne le verrez jamais !

Je fus plus frappée de cette réflexion que de la nouvelle en elle-même, et ce que notre ami croyait être une consolation pour moi fut une amertume. J’avais besoin de pleurer, mes larmes trouvèrent cette issue. Marius, qui était près de la porte ent’rouverte, me vit et accourut près de moi.