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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/171

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jet ; nous fûmes interrompus par Jennie, qui, me voyant animée et résolue, crut que j’étais heureuse.

— Voyons, dit-elle, M. Mac-Allan est donc bien content ? Il était gai comme un pinson en partant au galop sur votre cheval. Et vous, Lucienne, êtes-vous contente ?

— Oui, lui dis-je en la pressant dans mes bras. J’ai résolu de suivre aveuglément ses conseils, car il est mon véritable ami. Je te demande, ma Jennie, de ne pas trop m’interroger aujourd’hui, je ne saurais te répondre. J’ai besoin de rêver, puisqu’il n’y a plus lieu à réfléchir ; mais tu vois que je suis gaie et que je ne me repens de rien.

La bonne Jennie fut facilement abusée. Elle souhaitait tant mon bonheur, qu’elle y crut, et, respectant ce qu’elle attribuait au pudique recueillement du premier amour, elle ne m’interrogea pas davantage.

J’accomplissais avec ardeur et avec un véritable enthousiasme le sacrifice de mon existence. Il s’y mêla pourtant je ne sais quelles sensations de colère et d’amertume quand je m’aperçus que Jennie parlait avec plus d’abandon que d’ordinaire à Frumence, comme si, en admettant l’espoir de mon prochain mariage avec Mac-Allan, elle eût accepté enfin l’idée du sien avec notre ami. Je les laissai