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LXXX


Je me laissai emmener par Jennie sans trop savoir ce que je faisais, car j’étais bouleversée, et je croyais marcher dans un rêve. Je ne pouvais plus parler, et les détails que Jennie ajoutait aux explications données frappaient vaguement mon oreille sans avoir un sens bien net pour mon esprit. Je sentais venir une destinée nouvelle, et je ne la comprenais pas encore, car une ombre douloureuse planait sur l’avenir et sur le passé. Cette chimère s’empara tellement de mon imagination, qu’au moment d’entrer à Bellombre je m’arrêtai effrayée.

— Je t’assure, dis-je à Jennie, que je crois voir le fantôme de ma pauvre mère qui me défend d’entrer dans la maison de son mari.

— Où la voyez-vous ? dit Jennie sans se troubler.

— Là, devant cette grille, répondis-je éperdue et comme hallucinée.

— Eh bien, vous vous trompez, reprit Jennie en me montrant le ciel ; regardez cette belle étoile