Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/45

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seconde ? Il y a toujours des contrebandiers à Ouessant et ailleurs. Tous se connaissent. Je m’adresserai à eux, je les ferai parler. Pourquoi celui qui m’a dit la vérité aurait-il inventé cela ? Comment aurait-il fait pour l’imaginer et pour tomber juste ? Voilà un hasard que vous n’expliquerez pas. Et pourquoi ne dirait-il pas maintenant tout ce qu’il sait, s’il n’a pas été le complice de l’enlèvement ? Non, non ! tout n’est pas fini, parce que nous n’avons pas fait toutes les recherches qu’il fallait faire ; mais nous les ferons. C’est le moment de les commencer. Je n’y répugnerai plus. Si mon mari n’est pas à l’abri du blâme, il est maintenant à l’abri du châtiment. Et puis je n’ai pas d’enfants. Il n’avait pas de famille, lui ; moi, je n’en ai plus. Il n’y aura plus que moi pour porter un nom déshonoré. Rien ne me retiendra maintenant pour sauver Lucienne. J’ai eu tort peut-être d’attendre si longtemps. Les innocents doivent passer avant les coupables… Que voulez-vous ! c’était mon mari ! Et, quand à Brest ou à Toulon je voyais passer la chaîne, j’avais froid dans le cœur et je me disais : « Est-ce que je serai obligée de l’envoyer là ? » J’ai été faible, ma pauvre Lucienne ! il faut me pardonner, mais je réparerai tout. Je me mettrai en route demain s’il le faut, et, s’il le faut, j’irai jusqu’en Amérique.