Page:Sand - Constance Verrier.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fût pas de la partie ? Elle ne se piquait, comme feu Ninon, que d’unir le plaisir à l’amitié ; elle bannissait les grands mots de son vocabulaire ; mais elle était bonne, serviable, dévouée, indulgente, courageuse dans ses opinions, généreuse dans ses triomphes. Ces femmes-là sont les plus aimables et les meilleures de toutes les femmes, c’est bien connu.

« Et savez-vous pourquoi j’estimais particulièrement celle dont je vous parle ? C’est parce qu’elle joignait une saine intelligence à une grande volonté. Tout ce qu’elle déployait de finesse, de persévérance, d’habileté, d’empire sur elle-même pour se satisfaire sans blesser personne et sans porter atteinte à la dignité de sa position, est inimaginable. Elle a eu les plus brillantes conquêtes et les plus piquantes aventures de roman, et nul n’a jamais pu dire qu’elle eût manqué aux plus austères convenances. Elle n’était pas toujours heureuse dans sa lutte terrible contre cet œil du monde, qui n’est pas le soleil, mais l’opinion. Elle rencontrait des obstacles, elle côtoyait des périls extrêmes. Mais elle avait les consolations intérieures de la puissance assouvie. Elle se sentait forte, ardente et raisonnable en même temps, assemblage si rare que je défie qu’on me montre sa pareille ! »

Constance et Sofia se regardèrent involontairement à la dérobée, pendant que la duchesse parlait avec animation. Toutes deux sentirent que c’était d’elle-même qu’elle parlait, et toutes deux éprouvèrent une sorte de frayeur en devinant une pareille énergie dans