Page:Sand - Constance Verrier.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

un être aux formes si rondes et aux manières si moelleuses.

« Eh bien, reprit la duchesse, sans remarquer leur émotion ou sans en prendre souci, la raison de cette femme, c’est-à-dire sa force, venait peut-être d’une saine notion de l’amour. Elle ne demandait point aux hommes ce qu’ils n’ont pas, l’idéal ! Elle savait que le feu sacré brûle un instant dans une âme émue, mais que la vie est tiède, prosaïque, assez mesquine pour tous, hommes et femmes. Elle savait bien être une exception, mais elle ne s’en prévalait pas pour tourner à la misanthropie. Elle pensait que ses semblables eussent été aussi forts qu’elle, s’ils eussent fait les mêmes réflexions et s’ils eussent abandonné résolument deux erreurs graves : la première consistait, selon elle, dans cette soif des sublimités irréalisables qui rend les gens romanesques insatiables de bonheur ; la seconde, dans cette grossièreté des plaisirs sans choix qui dégrade l’esprit et le caractère. Elle passait au juste milieu, souriante, convaincue, accessible à la pitié, encourageante pour le mérite, artiste dans sa propre vie, et résumant toute sa doctrine en un seul mot qui, bien compris, est peut-être l’alpha et l’oméga de l’amour : ce mot, c’est volupté.

« Voyons, ma chère Mozzelli, ajouta la duchesse en se tournant vers la cantatrice et en la fascinant de son œil bleu, limpide comme le fond d’un lac : vous vous imaginez donc avoir fait autre chose, dans votre vie de fièvre et d’épuisement, que de chercher la volupté