Page:Sand - Constance Verrier.djvu/191

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— Il est vrai, je me suis livrée moi-même avec une loyauté bien méprisable !

— Dieu me préserve de mépriser une confiance qui m’avait si puissamment fasciné et si entièrement vaincu ! Il n’y a qu’un lâche qui puisse reprocher à une femme la généreuse faiblesse dont il a profité. Moi, je ne vous dirai pas que je vous en remercie, ce serait banal ; mais je vous promets, en échange de quelques jours d’ivresse, un respect et au besoin une protection de toute la vie.

La Mozzelli sentit que ce n’était pas là un serment frivole, encore moins une défaite. Attendrie un instant et puis désespérée : — Je vous perds, dit-elle, voilà tout ce que je comprends ! Cette femme que l’on préfère à toutes les autres, en dépit des faiblesses passagères auxquelles un homme peut succomber, j’avais rêvé que c’était moi, et j’aurais pardonné un caprice avec la duchesse. Oui ! je me serais vengée d’elle de cette façon-là ! J’aurais regardé ses bontés pour vous comme rien ! Mais vous aimez réellement une femme, et c’est pour celle-là que vous me quittez.

— Je vous quitte pour celle qui a, depuis longtemps, mon cœur et ma parole. Elle est le premier, le seul amour fort et sérieux de ma vie. Elle est ma sœur, ma mère et ma femme par la pensée, par l’estime mutuelle, par l’habitude de compter l’un sur l’autre. C’est pour elle et pour notre avenir que je travaille depuis longtemps ; c’est pour retourner à elle que je vous ai quittée et que j’ai pu surmonter le terrible charme