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Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 2.djvu/143

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consuelo.

des hussites ou des catholiques ? Les uns et les autres ne furent-ils pas victimes d’une fureur impie, et martyrs d’une foi également vive ? Est-il vrai que vous ayez choisi la croyance hussite, préférablement à celle de vos parents, et que les réformes postérieures à celles de Jean Huss ne vous paraissent pas assez austères ni assez énergiques ? Parlez, Albert ; que dois-je croire de ce qu’on m’a dit de vous ?

— Si l’on vous a dit que je préférais la réforme des hussites à celle des luthériens, et le grand Procope au vindicatif Calvin, autant que je préfère les exploits des taborites à ceux des soldats de Wallenstein, on vous a dit la vérité, Consuelo. Mais que vous importe ma croyance, à vous qui, par intuition, pressentez la vérité, et connaissez la Divinité mieux que moi ? À Dieu ne plaise que je vous aie attirée dans ce lieu pour surcharger votre âme pure et troubler votre paisible conscience des méditations et des tourments de ma rêverie ! Restez comme vous êtes, Consuelo ! Vous êtes née pieuse et sainte ; de plus, vous êtes née pauvre et obscure, et rien n’a tenté d’altérer en vous la droiture de la raison et la lumière de l’équité. Nous pouvons prier ensemble sans discuter, vous qui savez tout sans avoir rien appris, et moi qui sais fort peu après avoir beaucoup cherché. Dans quelque temple que vous ayez à élever la voix, la notion du vrai Dieu sera dans votre cœur, et le sentiment de la vraie foi embrasera votre âme. Ce n’est donc pas pour vous instruire, mais pour que la révélation passe de vous en moi, que j’ai désiré l’union de nos voix et de nos esprits devant cet autel, construit avec les ossements de mes pères.

— Je ne me trompais donc pas en pensant que ces nobles restes, comme vous les appelez, sont ceux des hussites précipités par la fureur sanguinaire des guerres