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Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 2.djvu/242

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consuelo.

« Tu auras quatre fois autant à la dernière course qu’à la première. »

Le guide obéit. En un instant le cheval que devait monter Consuelo fut préparé en selle de femme.

« Ce n’est pas tout, dit Consuelo en sautant dessus avant même qu’il fût bridé entièrement ; donne-moi ton chapeau, et jette ton manteau par-dessus le mien. C’est pour un instant.

— J’entends, dit l’autre, c’est pour tromper le portier ; c’est facile ! Oh ! ce n’est pas la première fois que j’enlève une demoiselle ! Votre amoureux paiera bien, je pense, quoique vous soyez sa sœur, ajouta-t-il d’un air narquois.

— Tu seras bien payé par moi la première. Tais-toi. Es-tu prêt ?

— Je suis à cheval.

— Passe le premier, et fais baisser le pont. »

Ils le franchirent au pas, firent un détour pour ne point passer sous les murs du château, et au bout d’un quart d’heure gagnèrent la grande route sablée. Consuelo n’avait jamais monté à cheval de sa vie. Heureusement, celui-là, quoique vigoureux, était d’un bon caractère. Son maître l’animait en faisant claquer sa langue, et il prit un galop ferme et soutenu, qui, à travers bois et bruyères, conduisit l’amazone à son but au bout de deux heures.

Consuelo lui retint la bride et sauta à terre à l’entrée de la ville.

« Je ne veux pas qu’on me voie ici, dit-elle au guide en lui mettant dans la main le prix convenu pour elle et pour Anzoleto. Je vais traverser la ville à pied, et j’y prendrai chez des gens que je connais une voiture qui me conduira sur la route de Prague. J’irai vite, pour m’éloigner le plus possible, avant le jour, du pays où ma