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Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 2.djvu/249

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consuelo.

Personne ne put lui en donner des nouvelles, et pour cause.

Il y avait bien une madame Wolf dans le village ; mais elle était établie depuis cinquante ans dans la ville, et tenait une boutique de mercerie. Anzoleto, brisé, exténué, pensa que Consuelo n’avait pas jugé à propos de s’arrêter en cet endroit. Il demanda une voiture à louer, il n’y en avait pas. Force lui fut de remonter à cheval, et de faire une nouvelle course à franc étrier. Il regardait comme impossible de ne pas rencontrer à chaque instant la bienheureuse voiture, où il pourrait s’élancer et se dédommager de ses anxiétés et de ses fatigues. Mais il rencontra fort peu de voyageurs, et dans aucune voiture il ne vit Consuelo. Enfin, vaincu par l’excès de la lassitude, et ne trouvant de voiture de louage nulle part, il prit le parti de s’arrêter, mortellement vexé, et d’attendre dans une bourgade, au bord de la route, que Consuelo vînt le rejoindre ; car il pensait l’avoir dépassée. Il eut le loisir de maudire, tout le reste du jour et toute la nuit suivante, les femmes, les auberges, les jaloux et les chemins. Le lendemain, il trouva une voiture publique de passage, et continua de courir vers Prague, sans être plus heureux. Nous le laisserons cheminer vers le nord, en proie à une véritable rage et à une mortelle impatience mêlée d’espoir, pour revenir un instant nous-mêmes au château, et voir l’effet du départ de Consuelo sur les habitants de cette demeure.

On peut penser que le comte Albert n’avait pas plus dormi que les deux autres personnages de cette brusque aventure. Après s’être muni d’une double clef de la chambre d’Anzoleto, il l’avait enfermé de dehors, et ne s’était plus inquiété de ses tentatives, sachant bien qu’à moins que Consuelo elle-même ne s’en mêlât, nul n’irait