Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/171

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courut, et sans penser qu’elle fût morte, car les enfants ne croient guère d’avance aux choses qui leur feraient une trop grosse peine, elle la prit dans son tablier et se dépêcha de courir pour la rapporter à la maison ; mais, tout en courant, elle s’étonna de sentir son tablier si léger qu’on eût juré qu’il n’y avait rien dedans. — Comme la pauvre Bichette a souffert et maigri en une nuit ! se disait-elle. Il me semble que mon tablier est vide. — Elle l’avait attaché autour d’elle et n’osait l’ouvrir, crainte de refroidir la petite bête qu’elle voulait réchauffer.

Tout d’un coup, au tournant du sentier qu’elle suivait, elle vit le petit Pierre, le fils de Joyeux le sabotier, qui accourait à elle, portant dans ses bras, devinez quoi ? Bichette bien vivante et bien bêlante. — Tiens, dit le petit Pierre à Catherine, voilà ton agnèle que je te rends. Hier soir, elle s’est mêlée avec mes bêtes comme tu rentrais en me montrant ton nid de merles. Tu n’as pas voulu me donner un de tes merlots, dont j’avais pourtant grande envie ; mais je suis meilleur que toi. Quand j’ai vu dans ma bergerie que ta Bichette avait suivi une de mes brebis, qu’elle prenait pour sa mère, je l’ai laissée têter tant qu’elle a voulu et passer la nuit à l’abri. Je te la rapporte ce matin, pensant que tu es en peine, car tu la croyais bien perdue, pas vrai ?

Catherine eut tant de joie qu’elle embrassa le petit Pierre et l’emmena chez elle pour lui donner deux de ses merlots, ce dont il fut si content qu’il en sautait comme un cabri en s’en allant.

Quand elle eut vu avec quel plaisir Bichette et sa