Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/229

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la hauteur et se perdaient sans bruit et sans bouillonnement dans l’eau salée ; mais, comme la marée n’était pas encore tout à fait montée, tout en entendant le bruit de la vague qui approchait, Clopinet ne voyait encore que cette longue et pâle bande de sable humide que perçait une multitude de masses noires plus ou moins grosses et toutes plus ou moins arrondies. Clopinet n’avait plus peur ; il regardait ces masses immobiles avec étonnement. C’était comme un troupeau de bêtes énormes qui dormait devant lui. Il voulut les voir de près et avança sur le sable jusqu’à ce qu’il put en toucher une. C’était une roche pareille à celle qu’il venait de quitter ; mais pourquoi était-elle noire, tandis que celles du rivage étaient blanches ? Il toucha encore et amena à lui quelque chose comme une énorme grappe de raisins noirs. Il avait faim, il y mordit, et ne trouva sous sa dent que des coquilles assez dures ; mais ses dents étaient bonnes et entamaient de petites moules excellentes. Aussitôt il les ouvrit avec son couteau et apaisa sa faim, car il y avait de ces moules à l’infini et c’était ce revêtement épais de coquillages qui rendait noirs les cailloux blancs tombés comme les autres du sommet et des flancs de la dune.

Quand il eut bien mangé, il se sentit tout ranimé et redevint raisonnable. Il ne se souvint plus d’avoir eu des ailes et pensa qu’il avait roulé doucement le long des marnes en croyant voler dans les nuages.

Alors il monta sur une des plus grosses roches noires et regarda ce qu’il y avait au delà. Il revit