Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/347

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je l’eus encore mieux regardé, je vis qu’il en avait, seulement ils étaient collés à son corps, et rien de tout cela ne bougeait. C’était une vraie statue, mais si haute que je ne pouvais pas distinguer sa figure.

J’aurais dû avoir peur devant une pareille chose ; eh bien ! expliquez cela comme vous voudrez, je n’eus que de la colère. Mon premier mouvement fut de ramasser une pierre et de la lancer au géant. Je ne le touchai pas. J’en lançai une seconde qui effleura sa cuisse, et une troisième qui l’atteignit en plein ventre et rendit un son comme si elle eût frappé une grosse cloche de métal, en même temps qu’un cri rauque, furieux, sauvage, semblait sortir de sa poitrine, répété par tous les échos de la montagne. Ma colère en augmenta, et je le criblai de toutes les pierres qui m’avaient servi à me renfermer. Devenant à chaque essai plus fort et plus adroit, je l’atteignis enfin au beau milieu du visage ; sa tête tomba aussitôt et vint rouler à mes pieds. Je m’élançai dessus pour tenter encore de la briser avec mon bâton ; mais je fus arrêté par une voix grêle qui partait de cette tête monstrueuse et qui faisait entendre un rire sec comme celui d’un petit vieillard édenté. — Est-ce toi, brute, lui dis-je, qui as cette façon ridicule de rire ou de pleurer ? Je vais bien te faire taire ; attends un peu ! — Et j’allais redoubler mes coups, lorsque la tête disparut et se trouva replacée sur les épaules du géant sans que je pusse voir comment il s’y était pris pour la ramasser. Je devins furieux. Je recommençai à l’attaquer à coups de pierres. Je le touchai au bras gauche ; le