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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

ces vieux grognards, qui veulent tout ou rien en matière de liberté et que l’on traite d’enragés parce qu’on ne peut les acheter.

Je crois donc le crédit de Duris-Dufresne diablement tombé. Il a perdu auprès du pouvoir ce qu’il a regagné en popularité. S’il n’obtient plus rien, il ne faut pas lui en faire un crime ; car le pauvre brave homme use bien des souliers pour le service d’autrui. Ne connaissez-vous pas M. de Bondy ? C’est lui qui est en faveur maintenant. Il est dans une belle position. Si la famille M… a des relations avec lui (il me semble que je ne l’ai pas rêvé), je me chargerai volontiers de tous les pas qu’il faudra faire. Dites-le à F… et embrassez-la bien de ma part. Je lui écrirai dans quelques jours.

Pour le moment, je suis écrasée de besogne ; besogne qui ne me mène à rien jusqu’ici. J’ai pourtant toujours de l’espérance. Et puis voyez l’étrange chose : la littérature devient une passion. Plus on rencontre d’obstacles, et plus on aperçoit de difficultés, plus on se sent l’ambition de les surmonter. Vous vous trompez pourtant bien si vous croyez que l’amour de la gloire me possède. C’est une expression à crever de rire que celle-là. J’ai le désir de gagner quelque argent ; et, comme il n’y a pas d’autre moyen que d’avoir un nom en littérature, je tâche de m’en faire un (de fantaisie). J’essaye de fourrer des articles dans les journaux. Je n’arrive qu’avec des peines infinies et une persévérance de chien. Si j’avais prévu la moitié