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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

journée, par exemple, je suis obsédée de visiteurs qui tous ne m’amusent pas. C’est une calamité de mon métier que je suis un peu obligée de supporter. Mais, le soir, je m’enferme avec mes plumes et mon encre, Solange, mon piano et mon feu. Avec cela, je passe de très bonnes heures. J’ai, pour tout bruit, les sons d’une harpe qui viennent je ne sais d’où et le bruit d’un jet d’eau qui est sous mes fenêtres dans le jardin. C’est bien poétique, ne vous en moquez pas trop.

Je vous dirai que je fais de l’argent ; je reçois de tous côtés des propositions.

Je vendrai mon prochain roman quatre mille francs. C’est plus que je ne demandais, moi qui suis fort bête. La Revue de Paris et la Revue des Deux Mondes se sont disputé mon travail. Enfin je me suis livrée à la Revue des Deux Mondes pour une rente de quatre mille francs, trente deux pages d’écriture toutes les six semaines. La Marquise a eu un grand succès et a complété les avantages de ma position.

Je n’ai plus le temps de regarder couler ma vie. Pour moi, dont le cœur n’est pas jovial, l’obligation de travailler est un grand bien. Solange me donne plus de bonheur à elle seule que tout le reste. Elle a fait de grands progrès d’intelligence et de gentillesse depuis ces quatre mois. Je pense bien que l’étude a beaucoup hâté le développement de cette jeune raison. Elle lit très-bien, avec beaucoup d’entendement des règles que vous lui avez données.