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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

départ si prochain pour l’Italie. J’aurai beau faire, je ne serai pas libre avant les vacances ; mais il ne me sera plus aussi facile d’aller vous rejoindre, car où vous trouverais-je ? Quoi que vous fassiez, ne quittez aucune ville sans m’écrire, ne fût-ce que deux lignes, pour me dire où vous êtes et combien de temps vous y restez. Rien ne me fera renoncer à l’espérance d’aller vivre quelques semaines près de vous. C’est un des plus doux rêves de ma vie, et, comme, sans en avoir l’air, je suis très persévérante dans mes projets, soyez sûre que, malgré les destins et les flots, je les réaliserai.

Pour le moment, je ferais mal de m’absenter du pays. Mes adversaires, battus au grand jour, cherchent à me nuire dans les ténèbres. Ils entassent calomnies sur absurdités pour m’aliéner d’avance l’opinion de mes juges. Je m’en soucie assez peu ; mais je veux pouvoir rendre compte, jour par jour, de toutes mes démarches. Si j’allais à Genève maintenant, on ne manquerait pas de dire que j’y vais voir Franz seulement et de trouver la chose très criminelle. Ne pouvant dire qu’entre Franz et moi il y a un bon ange dont la présence sanctifie notre amitié, je resterais sous le poids d’un soupçon qui servirait de prétexte entre mille pour me refuser la direction de mes enfants.

S’il ne s’agissait que de ma fortune, je ne voudrais pas y sacrifier un jour de la vie du cœur ; mais il s’agit de ma progéniture, mes seules amours, et à la-