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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

lonté, mais dont je me chargerais au besoin, pourvu que ce ne fût pas trop ostensiblement. On m’accuserait de vanité littéraire, de haine politique ou d’amour du scandale si j’avais l’air de pousser à une publicité particulière dans la localité. Cela m’est parfaitement égal, quant à moi, mais diminuerait peut-être dans quelques esprits la bonne impression que la lecture du fait a produite.

L’indignation est bonne aux humains et c’est ce qui leur manque le plus dans ce temps-ci. Si on pouvait susciter un peu de ce sentiment chez les ouvriers et les artisans de la Châtre, cela les rendrait meilleurs ; ne fût-ce qu’un quart d’heure, ce serait toujours cela ! Je serais donc flattée d’émouvoir ce public-là un instant ; et je crois que quiconque sait épeler peut comprendre le style trivial de Blaise Bonnin.

Que ne pouvons-nous faire un journal ! Je vous fournirais une série de lettres du même genre, où les moindres sujets, traités avec bonne foi, avec moquerie ou avec colère, feraient quelque impression sur les gens du petit état, et tu sais que ce sont ceux-là qui m’occupent. Les plus bêtes d’entre eux sont plus éducables, selon moi, que les plus fameux d’entre nous, par la même raison qu’un enfant inculte peut tout apprendre, et qu’un vieillard savant et habile ne peut plus réformer en lui aucun vice, aucune erreur. Ceci ne s’applique qu’à notre génération ; ce serait nier l’avenir, et Dieu m’en préserve ! Tout le monde se corrigera, grands et petits. Mais, si nous donnons aujour-