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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

nistère au grand Cabet, qui se pose en martyr. Tout le monde dit : « Nous sommes trahis ! » Enfin, c’est superbe. Si tu étais ici, nous irions passer le reste de la nuit à nous promener dans les rues pour voir la grande mystification. Elle est telle, que beaucoup d’hommes sérieux donnent dedans en plein.

Il ne tiendrait qu’à moi de me poser aussi en victime ; car, pour un Bulletin un peu raide que j’ai fait, il y a un déchaînement de fureur incroyable contre moi dans toute la classe bourgeoise. Je suis pourtant fort tranquille, toute seule dans ta cambuse ; mais il ne tiendrait qu’à moi d’écrire demain dans tous les journaux, comme Cabet ou comme défunt Marat, que je n’ai plus une pierre où reposer ma tête.

Demain, le gouvernement publie les grandes mesures qu’il a prises hier sur l’impôt progressif, la loi des finances, l’héritage collatéral, etc. Ce sera sans doute la fin de cette panique, et d’une bêtise générale sortira un bien général. J’espère aussi que ce sera la fin de la crise financière. Ainsi soit-il ! Ce sera un premier acte de joué dans la grande pièce dont personne ne sait le dénouement.

Bonsoir, mon Bouli ! ne sois pas inquiet : je t’écrirais s’il y avait seulement un coup de fusil tiré ; ainsi sois tranquille. Je te bige. J’ai vu Solange aujourd’hui. Elle se porte bien. Rien de nouveau pour mes affaires. Ma Revue ne prend guère : on est trop préoccupé, on vit au jour le jour.

Bonsoir encore ; j’écoute si la guerre civile com-