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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND
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qui ne sont pas des héros et des saints. Il me faudrait mépriser trop de gens, et moi-même, dont les entrailles ne peuvent pas s’endurcir au spectacle de la souffrance.

Et puis, je ne suis pas bien sûre que ceux qui ont sacrifié leur activité, leur carrière, leur avenir politique, leur réputation même, n’aient pas été, en certaines circonstances, les vrais saints et les vrais martyrs. L’intolérance et le soupçon, l’orgueil et le mépris, voilà de tristes chemins pour marcher vers le temple de la Fraternité !

Et puis encore, je vous disais, je crois, que toute bonne pensée vient de Dieu. S’il en envoie à nos adversaires, devons-nous y répondre par le dédain ? si nous le faisons, quand reviendront-elles, ces pensées de justice et de réparation ? Nous ne voulons pas que le joug devienne moins lourd. Nous sommes fiers, de la force de nos fronts, nous ne songeons pas aux faibles qui succombent !

Vous allez me trouver trop femme, je le sens bien. Mais je suis femme, et je ne peux pas en rougir, devant vous surtout, qui avez tant de tendresse et de piété dans le cœur.

Maintenant, vais-je trop loin dans l’amour de l’abnégation, et, vous, avez-vous été trop loin dans l’amour de votre propre dignité ? Que Dieu, qui sait nos intentions pures, pardonne à celui de nous qui se trompe. Dans un monde plus brillant et plus libre, comme ceux que nous promet Jean Reynaud, nous verrons