Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/104

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épave doit s’y échouer. Le vrai et le bien ne sont pas des mensonges ; il suffirait de les sentir vivants en nous-mêmes, pour être certain qu’ils existent dans la conscience de l’humanité. Qui nous les donnera, ces biens qui semblent faire partie du domaine de l’idéal, et dont le besoin est si grand, qu’il faudra bien les faire passer un jour dans celui de la réalité ?

Eh bien, je ne crois pas qu’un homme tout seul puisse nous les donner, au delà d’un certain moment où il se trouve en rapport avec la volonté du nombre. Toute institution qui confiera le pouvoir à vie, me paraît d’une durée illusoire et impossible. M. Thiers a ce pouvoir et cet élan pour le quart d’heure. Dans trois mois, il ne les aura peut-être plus, et les d’Orléans, s’ils ressaisissent la royauté, n’en auront pas pour trois ans.

Mais quels projets, quelles visions peut-on avoir sur des faits si troublés ? nous sommes véritablement tous plus ou moins fous en France à l’heure qu’il est. Le désastre et les efforts ont dépassé la limite du possible.

Il y a eu de grandes choses, il y en a eu de misérables ; ma seule consolation est d’avoir vu et senti que la France était meilleure, plus sage, plus dévouée que ceux qui se sont mêlés de la conduire et de la juger. Il est impossible qu’une si bonne nation ne se relève pas.

J’ai été heureuse de voir que vous répondiez carrément aux mensonges débités sur votre compte. Gardez votre âme au-dessus de ces orages, elle repren-