Pourquoi ôter le dévouement de cette fille pour sa mère, la lutte contre le père irrité, la confession qui est une justification de la mère devant sa fille et devant son futur gendre ? Dans la vie réelle, cela aurait à se passer ainsi. La fureur du grand-père éveillerait les soupçons effrayés de la fille, et la mère aurait besoin de ne plus les mériter ; car le général l’a calomniée par sa jalousie, en somme, et Moréali n’est pas le seul coupable de la pièce. Ce général dévot, c’est le mari d’Elmire dans d’autres conditions.
Je trouve aussi qu’après m’avoir fait réhabiliter Moréali, par cette candeur qui lui fait ignorer la passion qui le guide, vous me le feriez avilir en l’envoyant, de son propre mouvement, voler avec effraction, pour éviter un blâme assez léger de l’opinion publique.
Quel mal a-t-il fait volontairement à madame La Quintinie ? Aucun ! il n’a pas su qu’elle l’aimait, il lui a dit probablement du mal de son mari et de son père, il l’a peut-être engagée à les quitter. Les dévots seraient avec lui et, si le général plaidait contre lui, il perdrait. Lucie ne peut pas apprécier cela, elle ne sait rien ; mais Moréali, qui se sait innocent d’adultère, ne peut pas craindre au point de voler pour se soustraire à un scandale sans effet. On comprend qu’il le fasse pour se justifier aux yeux de Lucie, qu’il aime encore, qu’il aimera jusqu’au dernier soupir. Tout cela me paraissait s’enchaîner logiquement. Ce que vous m’écrivez aujourd’hui me fera peut-être changer d’avis demain matin : mais, jusqu’à présent, vous ne