ce n’est peut-être pas mauvais ; mais, chez nous, il y a excès. Aussi un encouragement de toi nous rend le courage, qui ne nous quitte pas, mais qui est souvent un courage triste, tandis que tu nous le fais brillant et gai, et sain à respirer.
J’ai donc bien fait de ne pas jeter Nanon au feu, comme j’étais près de le faire quand Charles-Edmond est venu me dire que c’était très bien et qu’il le voulait pour son journal. Je te remercie donc et je te rends tes bons baisers, pour Francia surtout, que Buloz n’a inséré qu’en rechignant et faute de mieux : tu vois que je ne suis pas gâtée, mais je ne me fâche jamais de tout ça et je n’en parle pas. C’est comme cela et c’est tout simple. Du moment que la littérature est une marchandise, le vendeur qui l’exploite n’apprécie que le client qui achète, et, si le client déprécie l’objet, le vendeur déclare à l’auteur que sa marchandise ne plaît pas. La république des lettres n’est qu’une foire où on vend des livres. Ne pas faire de concession à l’éditeur est notre seule vertu ; gardons-la et vivons en paix, même avec lui quand il rechigne, et reconnaissons aussi que ce n’est pas lui le coupable. Il aurait du goût si le public en avait.
Voilà mon sac vidé et n’en parlons que pour aviser à Saint Antoine, tout en nous disant que les éditeurs seront bêtes. Lévy ne l’est pourtant pas, mais tu t’es fâché avec lui. Je voudrais parler de tout cela avec toi ; veux-tu venir ? ou remettre à mon voyage à Paris ? Mais quand irai-je ? Je ne sais pas. Je crains un peu