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DCCCXCVII

À MAURICE-PAUL ALBERT, À PARIS


Nohant, 14 juin 1873.


Cher enfant,

Je m’inquiète de te savoir cloué et travaillant toujours avec tant de rage, quoique privé de l’air et de l’exercice qui réparent la dépense du cerveau. Moi, je suis anémique pour le moment, et je ne fais rien que rêvasser.

Le mauvais temps ne cesse pas, et mes forces ne reviennent pas vite. Je fais comme toi : je lis Renan, qui vient de m’arriver, et cela me paraît très beau. Je donne mes petites leçons à Aurore, qui n’est pas une piocheuse comme toi. Elle a une facilité admirable, mais peu de faculté à s’abstraire et à se concentrer. Elle fait tout très bien ou très mal, selon l’air qui souffle, et il n’y a pas à la contraindre. Ce serait pire. Elle est bonne et tendre, et tomberait dans le désespoir, si on lui faisait un reproche. Je l’attends donc, et, en attendant, je lui mâche et lui résume ce qu’il faut qu’elle commence à comprendre, à voir et à sentir. Elle a grand soin du joli bébé que tes sœurs lui ont envoyé. Elle admire le travail qu’elle n’aurait pas