Oui, monseigneur. Au coup de minuit, les personnes à qui elles sont adressées se trouveront ici.
Vous les tiendrez enfermées dans le pavillon avec messire Alvise, jusqu’à ce que je les fasse appeler.
Oui, monseigneur.
Quelle heure est-il ?
À peine onze heures.
C’est bien ; allez au palais, vous trouverez dans la grande salle de danse le seigneur Ordonio Éliséi. Vous lui direz que je l’attends ici ; ensuite, vous irez chercher la dame dont je vous ai parlé, avec les précautions que je vous ai recommandées.
Oui, monseigneur.
Non ! je ne pouvais pas m’en rapporter aveuglément à la parole d’une femme que le dépit et la jalousie égarent peut-être ! je devais me préserver aussi de la fascination que sa jeunesse et sa beauté exerçaient déjà sur moi. Insensés que nous sommes ! à quoi tiennent nos serments et nos résolutions ? Si la comtesse lisait dans mes pensées en cet instant… Allons ! il s’agit de faire le souverain et de tenter une épreuve… (souriant) dans laquelle le cœur du jeune homme n’est pas non plus tout à fait désintéressé… Quelle folie est la mienne ! (Il redevient sérieux.) Je travaille à rendre cette jeune femme à son mari, à ses devoirs, et, malgré moi, je souffre en songeant qu’elle a menti peut-être, et qu’Ordonio ne s’est pas vanté en vain d’être son amant !… Lequel des deux me trompe ? Il lui a écrit ce soir, j’en suis certain, et il a reçu d’elle la promesse