Page:Sand - Cosima.djvu/59

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COSIMA, tressaillant.

Merci, mon enfant !

Elle prend le bouquet. Pascalina sort.
COSIMA, regardant le fond du théâtre.

Il n’arrive pas !… Oh ! avec quelle impatience je l’attends ! Et, quand il sera ici, je souffrirai ! car le remords, L’effroi sont dans mon âme ! C’est le châtiment de mon crime ! — Si Ordonio était heureux, lui, du moins ! Mais il souffre et se plaint de moi ! Mon amour n’est rien pour lui sans l’entier oubli de mes devoirs… Ah ! quelquefois je suis tentée de croire qu’il ne m’aime pas ! — Et pourtant, comme il s’arrache avec empressement à cette cour brillante qui l’admire et le flatte, pour venir me voir, moi, pauvre recluse, humble bourgeoise, obscure, ignorée, que personne ne vante, que personne ne connaît ! — Ce n’est pas la vanité qui l’attire ici !… Et comme il s’expose pour venir me voir ainsi, la nuit, par des chemins dangereux !… Mais pourquoi donc ces instants d’amertume, d’ironie, on dirait presque d’aversion ? pourquoi a-t-il des mots qui glacent et des regarda qui font peur ? — Oh ! pourquoi Alvise m’abandonne-t-il ainsi ?… Il a confiance en moi, il m’estime, lui ! Mais il a trop compté sur ma force… Et mon oncle, pourquoi m’a-t-il trompée ? Car il me disait que la séduction ne pouvait m’atteindre… Il me trompait !… Ah ! insensée ! Je les accuse, et je leur cache ce qui se passe en moi ; j’évite les questions de mon confesseur, je fuis le tribunal de la pénitence !… Je deviens impie, je deviens folle !… Ah ! je souffre ! Il est temps qu’Alvise revienne. — Et s’il revenait déjà ?… Ces pas que j’entends, si c’étaient, les siens ?… (Ordonio parait.) Ordonio ! Ah ! j’ai tremblé que ce ne fût pas lui !




Scène III

COSIMA, ORDONIO.
ORDONIO.

Vous m’attendiez ! et pourtant vous ne m’aviez pas permis de venir aujourd’hui, madame.