Page:Sand - Flavie, 1875.djvu/168

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Qu’importe ! J’ai bien assez pensé à la vérité depuis que j’existe ! j’ai bien assez calculé les chances de mon bonheur, de ma liberté, de mon plaisir, de ma vanité ou de mon ambition ! Tout cela s’est envolé comme un rêve. Je suis absorbée par une idée fixe, et ce n’est plus à moi que je pense, c’est à quelqu’un qui tient ma vie, mon repos et mon orgueil sous ses pieds.

Oh ! l’étrange chose ! Qui eût cru cela, que j’aimerais ainsi et que je ne serais pas aimée ?

Car il ne m’aime pas, il me l’a dit, et, au lieu de me devenir odieux, il se fait aimer davantage par sa franchise et sa douceur.

C’est qu’il est bon, lui ! d’une bonté d’ange : pas de reproche, pas d’amertume… Il ne m’aime pas, voilà tout.

Et il a raison, je le sens bien. S’il eût cédé à une passion qu’il ne peut regarder que comme un caprice, je l’admirerais moins, j’aurais moins d’estime et d’enthousiasme pour son caractère.