Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/355

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

brillante en apparence et qui vous cède en vous voyant couvert de haillons et mourant de faim (c’est ainsi que j’étais en sortant des mains des Croates), une femme qui vous garde la plus stricte fidélité depuis le jour où elle vous a aimé, et qui, lorsque vous voulez lui assurer quelques ressources, au moment où vous venez de recueillir un petit héritage, vous jette au nez et foule aux pieds avec colère vos billets de cent louis, puis les ramasse et les brûle en pleurant ! non, cent fois non, cette femme n’est pas une fille, et on peut l’aimer fidèlement, sérieusement, et la défendre envers et contre tous. Quel que soit le passé d’une telle femme, il n’y a qu’un lâche qui puisse le lui reprocher, quand il a profité de son amour, quand il a reçu d’elle des services ; et vous savez très bien que sans V… j’aurais eu beaucoup de peine à revenir en France.

Les circonstances décident de nous, et souvent malgré nous, dans la première jeunesse, lorsque nous sommes sans ressources et sans appui.

Les femmes, plus faibles que nous et provoquées par nous qui nous faisons une gloire d’égarer leur faiblesse, peuvent se perdre aisément. Mais entourez les premières saintes du Paradis de tous les genres de séductions, mettez-les aux prises avec le malheur et l’abandon, et vous verrez si toutes s’en tireront aussi bien que certaines femmes dont vos arrêts croient faire une justice salutaire.