Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/182

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lorsque j’entendis le dernier roulement de la voiture qui l’emportait, je ne pus retenir des cris de désespoir, et Rose elle-même, malgré la sévérité dont elle commençait à s’armer, ne put retenir ses larmes en me retrouvant dans cet état pitoyable, trop violent pour mon âge et qui aurait dû me rendre folle, si Dieu, me destinant à souffrir, ne m’eût douée d’une force extraordinaire.

Je reposai cependant quelques heures : mais à peine fus-je éveillée que je retrouvai mon chagrin, et que mon cœur se brisa à l’idée que ma mère était partie, peut-être pour toujours. Aussitôt habillée, je courus à sa chambre, je me jetai sur son lit défait, je baisai mille fois l’oreiller qui portait encore l’empreinte de sa tête. Puis, je m’approchai du portrait où je devais trouver une lettre, mais Rose entra, et je dus renfermer ma douleur : non pas que cette fille, dont le cœur était bon, m’en eût fait un crime, mais j’éprouvais une sorte d’amère douceur à cacher ma souffrance. Elle se mit à faire la chambre, à enlever les draps, à relever les matelas, à fermer les persiennes.

Assise dans un coin, je la regardais faire, j’étais comme hébétée. Il me semblait que ma mère était morte, et qu’on rendait au silence et à l’obscurité cette chambre où elle ne rentrerait plus.

Ce ne fut que dans la journé