Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/214

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pa le château d’Ars, situé à une demi-lieue. Tous les jours, ces généraux, leurs aides-de-camp et une douzaine d’officiers principaux dînaient ou déjeunaient chez nous. Le général Subervic était alors un joli garçon très galant avec les dames, enjoué, et même taquin avec les enfans. Comme par sa faute, je m’étais un peu trop familiarisée avec lui, et qu’il m’avait tiré les oreilles un peu fort en jouant avec lui, je me vengeai, un jour, par une espièglerie dont je ne sentais guère la portée. Je découpai une jolie cocarde en papier blanc, et je l’attachai avec une épingle sur la cocarde tricolore de son chapeau, sans qu’il s’en aperçût. Toute l’armée portait encore les couleurs de l’empire, et l’ordre de les faire disparaître n’arriva que quelques jours plus tard. Il alla donc à la Châtre avec cette cocarde, et s’étonna de voir les regards des officiers et des soldats qu’il rencontrait se fixer sur lui avec stupeur. Enfin, je ne sais plus quel officier lui demanda l’explication de cette cocarde blanche, à quoi il ne comprit rien, et ôtant son chapeau et jetant la cocarde blanche au diable, il me donna à tous les diables par-dessus le marché.

J’ai revu ce bon général Subervic pour la première fois depuis ce temps-là, en 1848, à l’hôtel-de-ville, quelques jours après la révolution et lorsqu’il venait d’accepter le portefeuille de la guerre. Il n’avait oublié aucune des circonstances de son passage à Nohant en 1815, et il me