Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



CHAPITRE QUATRIÈME.

Idée d’une loi morale réglementaire des affections. — Retour à Nohant. — Année de bonheur. — Apologie de la puissance impériale. — Commencemens de trahison. — Propos et calomnies des salons. — Première communion de mon frère. — Notre vieux curé ; sa gouvernante. — Ses sermons. — Son voleur, sa jument. — Sa mort. — Les méfaits de l’enfance. — Le faux Deschartres. — La dévotion de ma mère. — J’apprends le français et le latin.


Je m’ennuyais beaucoup, et pourtant je n’étais pas encore malheureuse. J’étais fort aimée, et ce n’est pas là ce qui m’a manqué dans ma vie. Je ne me plains donc pas de cette vie, malgré toutes ses douleurs, car la plus grande doit être de ne point inspirer les affections qu’on éprouve. Mon malheur et ma destinée furent d’être blessée et déchirée précisément par l’excès de ces affections qui manquaient tantôt de clairvoyance ou de délicatesse, tantôt de justice ou de modération. Un de mes amis, homme d’une grande intelligence faisait souvent une réflexion qui m’a toujours paru très frappante, et il la développait ainsi :

« On a fait des règles et des lois morales pour corriger ou développer les instincts, disait-il ;