Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/531

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Je courus malgré elle trouver madame Marie-Augustine (Poulette), qui demeurait, je crois, dans le même dortoir[1]. Poulette était l’infirmière en chef, c’est elle qui avait les clefs et la surveillance de la pharmacie. Je lui dis que sœur Hélène était fort malade. Mais quoi ! la bonne, la rieuse, la maternelle Poulette haussa les épaules d’un air d’insouciance et me répondit : « Sœur Hélène ? bah ! bah ! elle n’est pas bien malade, elle n’a besoin de rien ! »

Révoltée de cette inhumanité, j’allai trouver la sœur Thérèse, la vieille converse aux alambics, la grande Irlandaise de la cave à la menthe. Elle travaillait aussi à la cuisine ; elle pouvait faire chauffer de l’eau, préparer une tisane. Elle m’accueillit sans plus de sollicitude que Poulette. « Sister Helen ! dit-elle en riant : she is in her bad spirits »[2]. Elle ajouta pourtant : « Allons, allons, je vais lui faire du tilleul, » et elle se mit à l’œuvre sans se presser et en ricanant toujours. Elle me remit la tisane et un peu d’eau de menthe en me disant : « Buvez-en aussi, c’est très bon pour le mal d’estomac et pour la folie. »

Je n’en pus rien tirer autre chose, et je

  1. On appelait dortoirs non-seulement la salle commune de la petite classe, mais aussi les corridors longs, étroits et obscurs qui séparaient les doubles rangées de cellules fermées.
  2. Sœur Hélène ! Elle est dans ses vapeurs. Littéralement : Dans ses mauvais esprits.