Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/696

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

aux soins de la campagne et du ménage avec une activité et une bonhomie touchantes. J’aimais son petit intérieur demi-rustique, tenu avec une propreté hollandaise, ses poules, son verger, ses galettes qu’elle tirait du four elle-même pour me les servir toutes chaudes. J’aimais surtout sa droiture, son bon sens, son dévoûment pour l’oncle et le réalisme de ses préoccupations domestiques, qui me faisait descendre de mes nuages et se présentait à moi avec un charme très pur et très bienfaisant.

Il lui vint une sœur qui me parut aussi très bonne femme, mais dont il plut aux moralistes de la ville de penser et de dire beaucoup de mal, j’ai toujours ignoré pourquoi, et je crois encore qu’il n’y avait pas d’autre raison à cela que la fantaisie de diffamation qui dévore les esprits provinciaux.

Il y avait une quinzaine de jours que cette sœur était au pays et je l’avais vue plusieurs fois. Elle me dit qu’elle viendrait à la fête de notre village ; elle y vint, et je lui parlai comme à une personne que l’on connaît sous de bons rapports.

Ce fut une indignation générale, et on décréta que je foulais aux pieds, avec affectation, toutes les convenances. C’était une insulte à l’opinion des messieurs et dames de la ville. Je ne me doutais de rien. Quelqu’un de charitable vint m’avertir, et comme, en somme, on ne me disait contre cette femme rien qui eût le sens commun,