Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/750

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malheur pour moi ? Elle me rappela ces jours de ma passion pour elle et me reprocha amèrement d’avoir laissé corrompre mon cœur par ma grand’mère et par Deschartres. « Ah ! ma pauvre mère, m’écriai-je, que ne m’avez-vous prise au mot dans ce temps-là ! Je n’aurais rien regretté alors. J’aurais tout quitté pour vous. Pourquoi m’avez-vous trompée dans mes espérances et abandonnée si complétement ? J’ai douté de votre tendresse, je l’avoue. Et à présent, que faites-vous ? Vous brisez, vous blessez mortellement ce cœur que vous voulez guérir et ramener ! Vous savez qu’il a fallu quatre ans à ma grand’mère pour me faire oublier un moment d’injustice contre vous, et vous m’accablez tous les jours, à toute heure, de vos injustices contre elle ! »

Comme, d’ailleurs, je me soumettais sans murmure à sa volonté de me garder avec elle, elle parut s’apaiser. La politesse extrême de mon cousin la désarmait par moment. Elle ne ferma pas tout à fait l’oreille à l’idée de me permettre de rentrer au couvent, comme pensionnaire en chambre, et j’en écrivis à Mme Alicia et à la supérieure, afin d’avoir une retraite toute prête à me recevoir, aussitôt que j’aurais conquis la permission d’en profiter.

Il ne se trouva pas un logement vacant, grand comme la main, aux Anglaises. On m’aurait reprise volontiers comme pensionnaire en classe ; mais ma mère ne voulait pas qu’il en fût ainsi,