Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/796

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pédant lui-même et dogmatisait sur toutes choses, il n’y avait guère moyen de ne pas disserter avec lui. Qu’aurais-je fait au Plessis de mon petit bagage d’écolier ? Cela n’eût ébloui personne, et je trouvais bien plus agréable de l’oublier que d’en repaître les autres et moi-même. Je n’éprouvais le besoin d’aucune discussion, puisque mes idées ne rencontraient autour de moi aucune espèce de contradiction. La chimère de la naissance n’eût été, dans cette famille d’ancienne bourgeoisie, qu’un sujet de plaisanterie sans aigreur, et comme elle n’y avait pas d’adeptes, elle n’y avait pas non plus d’adversaires. On n’y pensait pas, on ne s’en occupait jamais.

À cette époque, la bourgeoisie n’avait pas la morgue qu’elle a acquise depuis, et l’amour de l’argent n’était point passé en dogme de morale publique. Quand même il en eût été ainsi d’ailleurs, il en eût été autrement au Plessis. James avait de l’esprit, de l’honneur et du bon sens. Sa femme, qui était tout cœur et toute tendresse, l’avait enrichi alors qu’il n’avait rien. Le pur amour, le complet désintéressement étaient la religion et la morale de cette noble femme. Comment me serais-je trouvée en désaccord sur quoi que ce soit avec elle ou avec les siens ? Cela n’arriva jamais.

Leur opinion politique était le bonapartisme non raisonné, à l’état de passion contre la restauration monarchique, œuvre de la lance des