Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/135

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Des tressaillements involontaires trahirent son angoisse ; et quand elle l’eut finie :

— Pardon, Madame, dit-elle à Alice ; je suis obligée de recommencer, je n’ai rien compris, je suis trop troublée.

Troublée ! pensait Alice ; elle ne peut même pas dire émue ! Si son âme est aussi froide que ses paroles, quelle âme de bronze est-ce là ?

Isidora relut la lettre avec un imperceptible tremblement nerveux ; puis elle abaissa son voile sur son visage, se releva, et fit le geste de rendre le papier à sa belle-sœur ; mais tout à coup elle chancela, retomba sur son fauteuil, et, joignant ses mains crispées, elle laissa échapper une sorte de cri, un sanglot sans larmes, qui révélait une angoisse profonde, une mystérieuse douleur.

La bonne Alice n’en demandait pas davantage. Dès qu’elle la vit souffrir, elle s’approcha d’elle, prit ses deux mains, qu’elle eut quelque peine à désunir, et, se penchant vers elle avec un reste d’effroi :

— Pardonnez-moi d’avoir rouvert cette plaie, lui dit-elle d’une voix caressante ; mais n’est-ce pas devant moi et avec moi que vous devez pleurer ?

— Avec vous ? s’écria la courtisane effarée.