Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/238

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BARBE.

Elle a fait mieux, elle a osé dire qu’elle ne croyait pas à la damnation des hérétiques.

FRÈRE CÔME, d’un ton cafard et dogmatique. Elle a dit cela ? Ah ! c’est fort grave ! très-grave !

BARBE.

D’ailleurs, est-ce le fait d’une personne modeste de faire sauter un cheval par-dessus les barrières ?

SETTIMIA.

Dans ma jeunesse, on montait à cheval, mais avec pudeur, et sans passer la jambe sur l’arçon. On suivait la chasse avec un oiseau sur le poing ; mais on allait d’un train prudent et mesuré, et on avait un valet qui courait à pied tenant le cheval par la bride. C’était noble, c’était décent ; on ne rentrait pas échevelée, et on ne déchirait point ses dentelles à toutes les branches pour faire assaut de course avec les hommes.

FRÈRE CÔME.

Ah ! dans ce temps-là votre seigneurie avait une belle suite et de riches équipages !

SETTIMIA.

Et je me faisais honneur de ma fortune sans permettre la moindre prodigalité. Mais le ciel m’a donné un fils dissipateur, inconsidéré, méprisant les bons conseils, cédant à tous les mauvais exemples, jetant l’or à pleines mains ; et, pour comble de malheur, quand je le croyais corrigé, quand il semblait plus respectueux et plus tendre pour moi, voici qu’il m’amène une bru que je ne connais pas, que personne ne connaît, qui sort on ne sait d’où, qui n’a aucune fortune, et peut-être encore moins de famille.

FRÈRE CÔME.

Elle se dit orpheline et fille d’un honnête gentilhomme ?