Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/261

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Un indifférent eût peut-être préféré ces dernières interprétations pour la gloire de son étrange et angélique caractère ; mais moi, amoureux fou, j’eusse préféré l’emportement spontané de l’amour.

Je redevenais humble et accablé en regardant mes mains brunies, déjà dures et gercées par l’absence de soins, mon affreux déguisement, ma laideur relative et volontaire. Et tout à coup je me surprenais ivre de joie, en me persuadant qu’elle pouvait m’aimer encore tel que je me montrais à elle.

Quand je rapportai la plante à M. Butler, il était encore de bonne heure, et sa fille n’était pas éveillée. Nous ne devions pas faire de promenade. On voulait tenir compagnie à la pauvre recluse. On donnait campo aux guides. Je pensai qu’un peu d’importunité pour me rendre utile ou agréable quand même me laisserait un grand caractère de vraisemblance, et, cherchant un moyen de me faire rouvrir la porte de l’appartement, j’imaginai de mettre en tête des domestiques anglais de M. Butler une promenade pour leur propre compte M. Butler ne les emmenait jamais avec lui, et, comme ils étaient préposés à la garde des chevaux et des effets, ils sortaient peu et se gorgeaient de thé et de rhum pour tuer le temps. François, après avoir excité leurs esprits flegmatiques, alla trouver M. Butler pour lui remontrer que ces pauvres garçons avaient