Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/252

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Mais la puissance de m’abuser, qui me la donnera ? Hélas, pourquoi Dieu s’est-il plu à mettre une telle disproportion entre les illusions de l’homme et la réalité ? Pourquoi faut-il souffrir toujours d’un désir de bien-être qui se révèle sous la forme du beau et qui plane dans tous nos rêves, sans se poser jamais à terre ? Ce n’est pas notre ame seulement qui souffre de l’absence de Dieu, c’est notre être tout entier, c’est la vue, c’est la chair qui souffrent de l’indifférence ou de la rigueur du ciel. Dites-moi : dans quel climat de la terre, l’homme ignore-t-il les sensations excessives du froid et du chaud ? Quelle est la vallée qui ne soit humide en hiver ? Où sont les montagnes dont l’herbe ne soit pas flétrie et déracinée par le vent ? En Orient, l’espèce énervée végète et languit toujours couchée, toujours inerte. Les femmes s’étiolent à l’ombre des harems, car le soleil les calcinerait. Et puis un vent sec et corrosif arrive de la mer, et porte à cette race indolente une