Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/84

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’humilier et lui faire sentir le poids de ma protection. Vraiment, cet homme a l’ame noble et grande, et nulle amitié ne m’a plus flattée que la sienne.

Vous ne méprisez plus son caractère, mais vous méprisez sa condition, n’est-ce pas ? Jeune orgueilleux ! car c’est vous qui l’êtes ! osez-vous bien vous élever au-dessus de cet homme que la foudre a renversé ? Parce qu’il a été téméraire, parce qu’il s’est égaré à travers les écueils, vous lui reprochez sa chute, vous vous détournez de lui, alors que, sanglant et brisé, vous le voyez sortir de l’abîme ! Ah ! vous êtes du monde, vous ! Vous partagez bien ses inexorables préjugés, ses égoïstes vengeances ! Quand le pécheur est encore debout, vous le tolérez encore ; mais, sitôt qu’il est à terre, vous le foulez aux pieds, vous ramassez les pierres et la boue du chemin, pour faire comme fait la foule, pour qu’en voyant votre cruauté les autres bourreaux croient à votre justice. Vous auriez