Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/18

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après lesquelles s’égarait mon ame ; de sorte que j’arrivai dès l’adolescence à cette plénitude de facultés qui ne peut aller au-delà sans briser l’enveloppe mortelle.

» Quand j’entrai dans la vie active, j’avais devant moi tous les faits à apprendre, aucune émotion nouvelle à ressentir. Ceci est encore l’histoire de toute une génération.

» Alors un homme vint, et je l’aimai. Je l’aimai du même amour dont j’avais aimé Dieu et les cieux, et le soleil et la mer. Seulement je cessai d’aimer ces choses, et je reportai sur lui l’enthousiasme que j’avais eu pour les autres œuvres de la Divinité.

» Hélas ! cet homme n’avait pas vécu des mêmes idées. Il connaissait d’autres plaisirs, d’autres extases : il eût voulu les partager avec moi. Mais moi, nourrie d’une manne céleste, moi dont le corps était appauvri par les contemplations austères du mysticisme, le sang fatigué par l’immobilité de l’étude, je ne sentis point la jeunesse enfoncer ses aiguil-