Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/183

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milieu d’un silence de stupeur et de curiosité générale.

On savait le baron fort irascible sous son air endormi et blasé. On connaissait son indomptable orgueil. On s’attendait à une scène violente, et, en effet, le baron, devenu tout à coup d’une pâleur verdâtre, clignait ses grands yeux myopes, comme si la foudre allait s’en échapper pour anéantir l’audacieux inconnu qui le bravait si ouvertement ; mais le sang reflua à son front, qui sembla sillonné d’une grosse veine sanglante, tandis que ses lèvres devinrent plus livides que le reste de sa figure. Un cri sourd s’échappa de sa poitrine, ses bras s’étendirent convulsivement, et il s’affaissa sur lui-même en disant :

— Voilà, voilà !

Il serait tombé à terre si vingt bras ne se fussent étendus pour le soutenir. Il était évanoui, et on dut l’emporter vers une fenêtre dont on brisa précipitamment les vitres pour lui donner de l’air. Olga se fit jour à travers la foule pour lui porter secours. Marguerite disparut comme si sa tante l’eût escamotée, et Cristiano fut rapidement emmené par le major Osmund Larrson, qui l’avait pris en amitié.

— Venez avec moi, lui dit cet aimable jeune homme. Il faut que je vous parle.