Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/211

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Ulph ou Ulf (car l’un et l’autre s’écrivent suivant les traductions) essaya de se justifier ; mais il avait cherché de telles consolations, la veille au soir, dans la bouteille, qu’il avait l’esprit complètement appesanti, et se rendait difficilement compte des motifs qu’il avait eus pour délaisser son hôte. Aux approches du jour, Ulf se sentait ordinairement calme, et, quand se levait le tardif soleil d’hiver, il en avait pour cinq heures environ à n’être ni plus poltron ni plus maladroit qu’un autre. Ses trop nombreuses libations faisaient bien encore sentir leur effet sur sa cervelle engourdie ; mais, comme il n’en remplissait pas moins toutes ses fonctions domestiques avec la régularité d’une machine, cet état n’avait rien de fâcheux pour les autres et rien d’inquiétant pour lui-même. Il balbutia, en dialecte dalécarlien, quelques mots de surprise flegmatique en voyant les mets étalés sur la table et un inconnu attablé avec le docteur.

— Allons, sers monsieur comme moi-même, lui dit celui-ci ; c’est un de mes amis avec qui je veux bien partager mon logement.

— C’est bien, monsieur, répondit Ulf ; je ne dis pas le contraire, mais c’est le cheval…

— Cheval toi-même ! s’écria Cristiano, qui savait