Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/244

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de tendresse et de bonté. Son mari la chérissait avec enthousiasme, et, quant à elle, il lui était impossible d’admettre que Silvio Goffredi ne fût pas un demi-dieu, en dépit de sa maigreur, de son dos prématurément voûté et de ses distractions fabuleuses. Quelle âme pure et généreuse, d’ailleurs, dans ce corps fragile et sous ces dehors irrésolus et timides ! Son désintéressement était admirable. Le travail auquel il sacrifiait son emploi et ses habitudes en était la preuve. Il savait bien que de tels ouvrages coûtent plus qu’ils ne rapportent, en Italie surtout, et il ne comptait pas sur le sien pour augmenter sa fortune ; mais c’était sa gloire, le but et le rêve de toute sa vie.

» Ma pauvre mère était la plus impatiente de partir. Elle sentait une confiance absolue dans la destinée. Il fut décidé que nous commencerions par visiter les îles de l’Archipel.

» Permettez-moi de passer rapidement sur ce qui va suivre ; le souvenir en est déchirant pour moi. En traversant une partie de l’Apennin à pied, mon pauvre père se heurta contre un rocher et se blessa légèrement à la jambe. Malgré nos supplications, il négligea la plaie et continua de marcher les jours suivants. Il faisait une chaleur écrasante. Quand nous arrivâmes au bord de l’Adriatique, où nous devions nous embarquer, il fut forcé de prendre quelques