Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/26

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y a des moments où vous me paraissez paradoxal, et d’autres où je me demande si vous n’êtes pas un aussi grand sage que Diogène brisant sa tasse pour boire à même le ruisseau.

— Diogène ! dit Christian, merci ! ce cynique m’a toujours paru un fou rempli de vanité. Dans tous les cas, s’il était vraiment philosophe et s’il voulait prouver aux hommes de son temps que l’on peut être heureux et libre sans bien-être, il a oublié la base de son principe : c’est que l’on ne peut pas être heureux et libre sans travail utile, et cette vérité-là est de tous les temps. Se réduire au strict nécessaire pour consacrer ses jours et ses forces à une tâche généreuse, ce n’est pas sacrifier quelque chose, c’est conquérir l’estime de soi, la paix de l’âme ; mais, sans ce but, le stoïcisme n’est qu’une sottise, et je trouve plus sensés et plus aimables ceux qui avouent n’être bons à rien qu’à se divertir.

Tout en causant ainsi, nos chasseurs arrivèrent en vue de l’habitation rustique où ils étaient attendus. Elle était si bien liée aux terrasses naturelles de la montagne, que, sans la fumée qui s’en échappait, on ne l’eût guère distinguée de loin.

— Vous allez voir un très-brave homme, dit le major à Christian, un type de fierté et de simplicité dalécarliennes. Il y a bien dans la maison un être