Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/25

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chez un homme isolé, c’est une lâcheté, et il n’y a pas moyen de la traduire autrement que par cette plainte dont vous allez voir l’effet burlesque dans la bouche d’un homme bien bâti et aussi bien portant que je le suis. Tenez, supposons un monologue de marionnettes. C’est notre ami Stentarello qui parle ingénument : « Hélas ! trois fois hélas ! je ne dormirai donc plus dans ces draps fins ! Hélas ! je ne pourrai plus, quand j’aurai chaud en Italie, prendre une glace à la vanille ! Hélas ! quand j’aurai froid en Suède, je ne pourrai donc plus mettre du rhum de première qualité dans mon thé ! Hélas ! je n’aurai plus d’habit de soie couleur de lavande pour aller danser, plus de manchettes pour encadrer ma main blanche ! Hélas ! je ne couvrirai plus mes cheveux de poudre de violette et de pommade à la tubéreuse ! étoiles, voyez mon destin déplorable ! Mon être si joli, si précieux, si aimable, va être privé de compotes dans des assiettes de Saxe, de ruban de moire à sa queue, de boucles d’or à ses souliers ! Fortune aveugle, société maudite ! tu me devais certes bien tout cela, ainsi qu’à Christian Waldo, qui fait si bien parler et gesticuler les marionnettes ! »

Larrson ne put s’empêcher de rire de la gaieté de Christian.

— Vous êtes un bien drôle de corps, lui dit-il. Il