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Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/300

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vait rien de la tournure dégagée d’un mineur habitué à se servir du tonneau.

À peine eût-il parlé, que l’inconnu, comme s’il eût voulu entendre sa voix avant de prendre un parti, monta auprès de lui avec plus de résolution que d’adresse, et attendit en silence le second coup de sifflet.

Christian supposa que cet homme n’entendait pas le norvégien, et, comme il connaissait désormais presque tous les dialectes du Nord, il essaya de l’interroger, mais en vain ; l’inconnu demeura muet, comme si l’effroi de se voir suspendu à mi-chemin de l’abîme eût paralysé ses facultés. Le tonneau, ou seau des mines, est, comme on le sait, formé de douves épaisses cerclées de fer, et qu’il faut pourtant diriger dans les grandes excavations. Christian, déjà très-habitué à ce mode de transport, manœuvrait très-adroitement. Debout sur le rebord, un bras passé dans la corde, il frappait légèrement du pied les parois du puits quand le balancement menaçait d’y briser le seau, et, renonçant à arracher un mot à son camarade de voyage, il s’était mis à chanter tranquillement une barcarolle vénitienne, quand le seul de ses pieds qui portât en ce moment sur le bord du véhicule fut traîtreusement poussé avec assez de vigueur pour perdre son point d’appui et se trouver lancé dans le vide.